Originalité de la poésie Afro-cubaine

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VERSIÓN en ESPAÑOL

Cuba a beau sembler éloignée du continent latino-américain, il se dégage du livre de Santiago Miguel Carnago Lopez, « De congo y Carabali » -poesia mulata de Cuba– des parfums qui nous en rapprochent. Ce recueil de poèmes, édité au Mexique trouve son inspiration dans la deuxième ville de l’île, Santiago, située à l’Est, et qui, comme le dit la chanson « Veneracion » est « la terre du savoureux Son ». Accessibles, les poèmes s’attachent à entretenir la mémoire des lieux et des personnes de la ville.

Ceux-ci sont autant d’hommages, à Compay Segundo, ou à la richesse de la culture noire, très présente dans la musique , mais aussi dans la façon de déguster le café, ou le rhum : « la mulata mueve el cuerpo con cintura de jabon, y el sudor de sus entrañas, mas que a sudor huele a ron ». Tous les éléments renvoient les uns aux autres, sont comme des correspondances, la nature, et les gens, les couleurs, mêmes opposées, se rencontrent, à en perdre le contrôle, comme sous l’effet d’un mirage : « uno negro y otro blanco ahora son de igual color. Dos senos que se revuelcan ».

N’oublions pas qu’à Cuba, la littérature et la musique ont eu des influences l’une sur l’autre, notamment grâce au remarquable travail de Nicolas Guillén, véritable passeur entre les genres, tandis que d’autres comme Fernando Ortiz Fernandez proposaient des études détaillées de la culture noire. A une époque, déjà tardive, oú Cuba s’achemine vers l’indépendance, c’est N.Guillén qui est marqué par cette lutte, puisque son père y participe, et en meurt. Par la suite, guidé par d’autres, il comprend l’importance d’utiliser des éléments culturels pour mieux revendiquer les droits des noirs, encore marginalisés dans l’île malgré que l’esclavage y ait été aboli. Dans son livre, Motivos de son, il s’inspire de la dynamique présente dans la musique de « son », en plein essor dans les années 20 pour donner un rythme à ses poèmes. Réciproquement, les histoires racontées dans certains de ses poèmes, comme « Negro bembon » serviront de base à des chansons qui seront chantées par de nombreux auteurs, de Cuba à Puerto-Rico (respectivement Celia Cruz, Compay Segundo, et Ismaël Rivera pour la chanson « Negro bembon »). Il décide par ailleurs, que le terme de poésie « mulata » (traduisez mulâtre ou métisse) est plus exact que « noire » pour décrire ce courant de poésie, le noir n’ayant jamais eu l’occasion d’exprimer, dans sa propre langue, les particularités de sa culture puisque le régime colonial faisait peser sur lui une censure, notamment religieuse.

Pour la petite histoire, on sait que Nicolas Guillén est venu au Chiapas, tiré par la manche par Armando Duvalier, un poète qu’il avait rencontré à Mexico, au cours de rencontres avec des intellectuels, eux-mêmes en quête d’une identité pour le Mexique. A cette époque les intellectuels pouvaient encore prétendre participer à des réflexions générales sur la société.

Aymeric Lehembre

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