Faisons le pozol et pas la guerre

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TUXTLA, MARCHÉ DU 5 MAI, AU STAND DE DONA ELISABETH

C’est une boisson typique, très appréciée au Chiapas et dans l’Etat de Tabasco. Ses ingrédients de base sont le maïs et l’eau, et dans les régions chaudes on le mélange aussi au cacao, ce qui le rend d’autant plus savoureux. On y ajoute du sucre, et de la cannelle. Il ne nous a pas fallu longtemps pour dénicher, à San Cristobal de Las Casas, ville d’altitude, les lieux où on en consomme, tandis que dans la vallée, plus bas, il y en a pléthore, pas toujours de qualité égale. Rencontre avec quelques artisans et amateurs de cette boisson traditionnelle qui, en plus d’être nutritive, crée cette convivialité propre au Sud-Est du Mexique.

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A 9h00, le lieu « Las Jícaras » commence la préparation de ce qui lui permettra de faire sa journée: entre 40 et 50 litres de breuvage. A 10h00 c’est prêt, mais ça doit reposer, un peu. William, et sa compagne Sol ont ouvert le lieu il y a deux ans, et ils vendent du pozol toute l’année. Leur carte n’est pas excessivement fournie, mais le pozol est un petit plus, qui les a aidés à constituer leur clientèle. Ils ne vendent d’ailleurs, comme autre boisson, que la « jamaica », ou jus de fleur d’hibiscus, boisson aussi très répandue. Pas de softs, ce qui étonne parfois les clients. Mais « ça fait partie de nos envies, vendre des produits sains, et accessibles », explique William.

La clientèle, assez variée, vient s’attabler, entre 10 et 16h00, passant du petit-déjeuner au repas de midi, qui tous deux, se prennent assez tard, au Mexique. Parfois des personnes, seules, s’arrêtent juste le temps d’un pozol. Des groupes mêmes, ouvriers ou employés en général, mais aussi intellectuels, taillent la bavette au rythme du pozol, qui joue le rôle tantôt de pause café et tantôt d’apéritif. La « jícara », sorte de bol naturel dans lequel on sert le précieux liquide est tirée d’un fruit qu’on fait sécher, portant le nom de « Morro ». « Pas de bol en plastique, de préférence », nous dit William : « la jícara peut aussi se partager, ce qui n’est pas le cas de la tasse de café ».

Les marchés, qu’ils soient situés dans les villes des hauteurs, ou dans la vallée sont un lieu idéal pour goûter le pozol. Lieux de passage, d’échanges, de rencontres. Tandis qu’à Chiapa de Corzo, ville très touristique, on vend du pozol à tous les coins de rue, dans la Capitale, Tuxtla, le marché du 5 mai est le lieu par excellence qui réunit les amateurs. Entre 12 et 14h00 c’est l’heure de pointe, une frénésie s’empare des gens qui viennent s’agglutiner autour des « postes » de pozol richement pourvus en amuses-gueules divers : mangue aux piments, concombres ou encore piments découpés et macérés dans du citron, pour finir avec le « dulce de calabassa » (douceur de calebasse). Nous sommes assis au comptoir de Dona Elisabeth, une vétérane du pozol. Elle en vend depuis 25 ans et sait vanter la fraîcheur de sa marchandise : « nous faisons de petites quantités, et tout ce qui est fait est vendu le jour même ». A côté de nous sont assis Martin et Catalina, habitants de San Cristobal venus régler des affaires à la capitale.

Ils ont profité de la chaleur ambiante -doublée d’un soleil qui tape dur- pour faire une halte :« Le pozol est une boisson ancestrale dont la fonction première est de nourrir, rapidement, l’homme, qui travaille », déclare Martin. « Il est lié au travail, fait en priorité, à l’extérieur de la maison, dans les champs, ou dans la jungle » -il existe au Chiapas une région naturelle appelée jungle Lacandone, où Martin travaille parfois, il est avocat. Rares sont les amateurs de pozol qui en parlent aussi bien que lui : « Le mélange avec le cacao est lié aux routes qui existaient déjà à l’époque des Aztèques, et au parcours que suivait le cacao, originellement cultivé en majorité au Soconusco (région frontière avec le Guatemala). Ici, à Tuxtla, nous sommes dans cette vallée, celle du fleuve Grijalva, dont la source se trouve au Guatemala, et qui facilitait le contact et le transport d’un lieu à l’autre».

Vous l’aurez compris, la tradition du pozol au Chiapas ne date pas d’aujourd’hui, mais sa recette est particulière et tous ne se valent pas. Pour certains, le découvrir c’est l’adopter, tandis qu’il faudra à d’autres, un peu de temps pour s’y adapter, ou pour trouver celui qui leur plaît. Il existe divers dictons locaux liés au pozol, comme « caval tu paga, caval tu pozol », (ce que tu paye, tu l’auras en pozol) que William s’est ingénié à répertorier et à écrire sur les murs de son édifice. L’un d’entre eux, -en partie inventé celui-là- nous a enchanté : « faisons le pozol et pas la guerre ».

Aymeric Lehembre

 

Du swing portugais pour les années 2000!

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On n’avait rien vu mais petit à petit ils arrivent!

Le Portugal parait une région assez défavorisée au niveau des musiques du monde si on excepte évidement le sempiternel fado, décliné à toutes les sauces, et pas toujours des plus légères!

Et bien, une nouvelle génération de musiciens débarque sur la scène, bien décidés à placer le Portugal sur la carte des musiques qui bougent. ils se nourrissent des racines, les digèrent et les transforment en savoureux brouet moderne. Sans pour cela sacrifier aux dictats du tout public (basse électrique, batterie primate, synthé, etc.). Les points communs entre ces 4 nouveaux noms: l’humour désabusé, l’acoustique, la contrebasse (Une « contrebassine » même chez OQueStrada!) et le swing!

Nous vous conseillons ici quelques pistes afin d’appréhender cette nouvelle scène vivace et déjà très populaire dans son pays d’origine.

•• DEOLINDA ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••

Les plus populaires. Leurs 2 albums ont été n°1 au Portugal! Ce n’était pas évident avec leur musique totalement acoustique et dénuée d’instruments rythmiques (si on excepte un discret triangle de temps à autre)! C’est leur maestria mélodique, leur humour ravageur et leur capacité incroyable à retransposer les traditions du pays dans un vocabulaire actuel et accessible à tous, qui contribuent à leur énorme succès. Nous leur avons consacré une émission lors de leur passage en Belgique.

Les disques:
« Canção ao lado »

« Dois selos e um carimbo »

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•• OQUESTRADA ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••

Le groupe à commencé dans la rue et ça s’entend dès les premières minutes de son album « Tasca Beat » (« rythmes de troquet »). Il y a un soupçon de musette dans leur swing acoustique, du swing manouche, et de la nostalgie bien portugaise!
On ne connais que leur CD, mais on imagine qu’en concert, l’ambiance doit être très très chaude!

Le disque: « Tasca Beat »

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•• MELECH MECHAYA ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••

C’est plutôt à la fontaine klezmer qu’ils vont puiser leur énergie. Le klezmer, une musique ô combien déjà exploitée et de toutes les façons, pas toujours les plus honorables. C’est plutôt dans la simplicité que ce groupe interprète cette musique, favorisant la rythmique swing et épurant les mélodies tarabiscotées habituelles du genre.

Le disque: « Budja Ba »

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•• ANTONIO ZAMBUJO ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••

Dans le plus intime, António Zambujo, se pause comme le Caetano Veloso du fado portugais. Même voix, même charme, même liberté par rapport à un genre assez balisé. On croise un tuba en liberté ici, un rythme quasi tango là-bas. Le swing se fait câlin et indolent.

Le dernier disque: « Guia »

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Kottarashky: « Opa Hey! »

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C’est en dernière minute que mon invité pour l’émission Djiboutik dressant un succin panorama de la musique en Bulgarie, m’envoie un message: « good good bulgarian band… » et juste un lien « http://www.youtube.com/watch?v=cbBimnHotmk« . On y découvre une vidéo artisanale avec une bande son très étonnante! Fallait-il complètement changer d’optique pour l’émission? Car, en effet, ce projet « Kottarashky », apportait une nouvelle pierre à l’édifice de la musique bulgare! Alors que nous nous apprêtions à parler de la musique bulgare comme d’une histoire chronologique démarrant de la musique traditionnelle pour se terminer au rock alternatif en passant bien sûr par le hip hop et par la fameuse et surtout fumeuse « chalga », on pouvait croire qu’à la pointe de l’avancement de la musique populaire bulgare actuelle, on en resterait quand même avec des choses déjà franchement bien entendues ici depuis au moins 10 ans. Et bien non, Kottarashky dément complètement cette cinglante affirmation.

En effet, ce projet mené par un jeune homme de Sofia (Bulgarie), est en phase avec les tentatives de mix entre la musique électronique et les musiques traditionnelles. Si beaucoup de mix se réalisent en ce moment, nombre d’entre eux ne gardent de la musique traditionnelle qu’un jus parfois bien maigre qui épicera un pesant ragout électronique. La force de ce projet-ci est de non seulement user de ce jus primal mais d’en garder toute la saveur d’origine. Tous les samples – et il y en a un paquet pour chaque morceau, flute, accordéon, percussion, guitare, cuivre, cornemuse, voix, etc. – sont des sons d’origines contrôlées. Venants pour la plupart sans doute des Balkans avec une forte prédominance pour les Balkans Bulgares.

Il ne s’agît pas de musique vraiment faite pour danser, on est assez loin des compilations « Balkan Beat », on est plutôt du côté d’une mélopée rêveuse mais quand même bien cadencée. Le côté expérimental des chansons apporte le grain exotique à une musique balkanique qu’on nous propose déjà depuis un bon moment à toutes les sauces. Voilà enfin de la modernité! Ce n’est pas juste un habillage de parade pour piste de danse, le swing primal en est bien vivant, il n’est pas enflé artificiellement à renfort de gros beat gras du bide!

Bon, le gars est encore jeune et sans doute qu’il nous réalisera des morceaux plus accessibles, mélodiquement plus fort, rythmiquement plus dansant. S’il y arrive sans se compromettre dans la soupe Balkan Beat, chapeau!

Hubdidub

Canta! Concours de la chanson latino américaine.

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Ces deux émissions ont été consacrées au concours de la chanson populaire latino américaine.

Dans la première, nous recevons, Constanza Guzman et Maria Antonia Sabater, deux des participantes aux concours et parlons avec elles de la vie des musiciens latino-américains en Belgique.

Dans la deuxième, nous nous focalisons sur le festival en lui-même avec Edison Guzman, membre du jury, et Luis Guzman, coordinateur artistique du festival.

Ci dessous, retrouvez la chronique complète du concour:

Coup de projecteur sur une musique vivante.

Il m’était déjà arrivé d’assister a un concours de musique en Amérique Latine. C’était le “Festival De Las Orquestas” durant le carnaval de Barranquilla en Colombie. C’était impressionant de voir défiler une série de groupes, du plus inconnu au plus révéré. Oui même les plus grandes stars de la région, même un chanteur dont la réputation a franchement dépassé les frontières du pays, du continent même, participèrent avec tout leur coeur à ce concours. La diversité musicale était incroyable pour un concours régional comme celui-là. Je n’ai jamais su les résultats, sans doute qu’ils furent publié dans la presse du lendemains. Peu importe, le principal fut de sentir le plaisir des musiciens à pouvoir se présenter sur une grande scène, ici un stade,  sentir le plaisir et aussi l’attente par rapport à ce que pourrait apporter un prix dans une carrière musicale. Il ne s’agît pas, je crois, de planifier enregistrement de CD et d’organiser la tournée mondiale, mais surtout, de pouvoir se faire entendre, de pouvoir s’exprimer. C’est quand même ça le but de l’artiste, non?

C’est en tout cas, ce qui ressort de ce que m’ont dit les participants au concours “Canta!” organisé par la Maison de l’Amérique Latine au théâtre Molière. “On est là pour partager la joie”, “Nous avons un message à vous délivrer”, “Nous sommes là pour porter haut les couleurs de notre pays!”. Chacun a sa propre motivation pour venir se présenter sur la scène du concours, mais dans l’ensemble ils y sont tous pour parler de leur situation, de leur parcours, de leur vie.

De tous les horizons latinos et même plus

C’est sans doute pour ça qu’ils étaient nombreux à se présenter au concours “Canta!”. En effet 15 formations avaient été sélectionnées sur l’écoute d’une chanson et sûrement qu’il y en avait encore plus, intérressées à l’idée de ce faire connaître lors de ce tremplin. Des formations de toutes sortes, de tous les horizons latinos, jusqu’au frontière même de ceux-ci, “Son Da Republika”, par exemple, n’apporte que quelques mots en espagnol et un percussioniste d’amérique latine dans ses valises. Ca démontre bien le grand mélange que devient la musique. Des musiciens latino-américain arrivent, des musiciens européens les accueillent, la musique vie et évolue comme ça depuis toujours. D’abord de village en village, puis de pays en pays et maintenant de continent en continent. “il ya de fortes influences européennes dans tous les projets que nous pouvons voir ici” nous a dit Silvia Abalos, la présidente du jury.

En dehors de ces influences, nous avons la chance également de nous apercevoir de la grandes diversité des sources, la diversité incroyablement riche de l’Amérique Latine. Qu’a à voir une jeune colombien débarqué à Paris avec un musicien espagnol d’âge mûr de formation classique? Les langues latines “… et Don Ramon!!” (le héro d’“El Chavo del Ocho” une série télévisée populaire dans toute l’Amérique Latine) me dit ce même jeune colombien. L’image monolitique que peut avoir le continent aux yeux de certains européens en prend un sacré coups! Mais c’est drôle quand même aussi de voir que certains clichés nationaux persistent quand on intérroge plus profondément les artistes de ce concours:  L’exhuberence quasi mystique des brésiliens, l’élégante retenue des andins, l’énergie des mexicains, le caractère des cubains, la bonhommie des colombiens, on pourrait continuer comme ça longtemps… L’artiste n’est-il pas le receptacle des émotions de son environement? Transmettant ses dernières avec tout son cœur…

Samedi

Le samedi, nous sommes accueilli par les percussions du groupe Ka-ndombe. Une bonne idée ça: à peine arrivé dans le quartier, avant même d’apercevoir âme qui vive, nous proviennent ces rythmes démultipliés par les hauts bâtiments du square du Bastion. Impressionant! Ils nous emmènent vers le théâtre des opérations et s’installent sur scène pour quelques chansons en guise d’introduction. Autant dire qu’ils chauffent bien le public!
Après les quelques mots d’introduction d’usage, le concours peux enfin commencer. Les présentateurs encore froids – mais cela ne vas pas durer! – prennent leurs marques. Les premiers prétendants au podium peuvent enfin s’avancer. Je ne sais pas comment l’ordre de passage du concours a été décidé mais c’est une drôle d’idée que de débuter par le groupe d’Henri Greindl. En effet, nous n’étions pas prêt à se laisser emporter par leur bossa lyrique tout en nuances jazzy délicates et constructions avant gardistes. Qu’à cela ne tiennent, le trio est très proffessionnel et convaincra le jury.

J’ai la chance de rencontrer la meneuse d’hommes cubaine Maria Antonia Sabater juste avant sa prestation. Nerveuse mais très décidée, elle m’explique que “ce concours est une excellente opportunité pour le nouveau projet, formé il y a à peine 2 mois” et dans lequelle elle va pouvoir enfin chanter ses propres compositions. Effectivement, beaucoup de groupes qui se présenteront ce week end seront dans une situation similaire: des musiciens qui se rassemblent spécialement pour l’occasion ou qui en profitent pour démarer un vrai projet ou encore qui composent une chansons uniquement pour le festival. Qui sait si ces formations éphémères dureront? En tout cas, si elles persistent, le festival aura au moins eut le mérite d’en être le détonateur! La chanteuse cubaine s’en sort bien – hélas mieux que le jour suivant. Sa composition, un précipité de “son” et de “pop” tout en break abrupt, est rondement menée par cette cubaine blonde comme les blés en été et au caractère bien trempé. Voilà une voix qui devrait faire son du chemin!

L’avantage de ce concours pour le public c’est que tous les univers ce cotoient et que chaque prestation est une surprise et un contraste frappant avec le précédent. On change donc complètement d’athmosphère avec Constanza Guzmán. Cette auteur-compositrice est née en Belgique mais a vécu sa prime jeunesse au Chili, pays d’origine de ses parents. On sent, dans ce qu’elle dit et dans ce quelle nous donne à voir sur scène, qu’elle est tiraillée entre ces deux cultures. “Mes textes sont chiliens, je pense au poêtes que j’aime de là-bas, mais dans la manière universelle qu’ils ont d’aborder des thématiques spécifiques du Chili”. Chant extatique en espagnol accompagné d’un piano tranquille et féminin, le tout coloré d’un violon impressioniste, la salle s’émeut.

Son da Republika est un collectif  formé spécialement pour l’occasion et le rassemblement éclectique de musiciens, plus enthousiastes que professionnels, très divers. On se réjouit de voir cette fraiche énergie collective qui s’ébroue joyeusement, mais le manque d’expérience bride sérieusement leur potentiel.

C’est un homme seul qui suit, Adrian Vélez, juste accompagné de sa fidèle guitare. La fraicheur de la jeunesse, le naturel confondant (que même le déclanchement intempestif des alarmes d’incendie ne perturbera pas) conquiert la salle et le jury. Ce pop-rock accoustique aux accents latins nous rappelle de loin un Juanes plus humble.

On se téléporte à nouveau dans un univers particullier avec les jeunes de Madera Suena. C’est à Paris qu’on se retrouve alors. A Paris où ce sont rencontrés ces jeunes latino-américains. “Je suis content de mon choix d’avoir bougé vers l’Europe, jamais dans mon pays je n’aurais pu rencontrer les musiciens du groupe, un chilien, un bolivien, un péruvien, et un brésilien, et on s’apprend mutuellement plein de choses!” nous dit le colombien meneur de cette joyeuse bande. Leur musique embalante manque pourtant encore d’un peu de maturation. Bravo pour l’expérience de fusion, mais pourvu qu’elle ne soit pas ni trop chargée ni trop pédagogique.

La proposition suivante sera la plus traditionnelle de ce à quoi on peut s’attendre à ce concours. Il faut entendre par là: “on s’y croirait”. On se croirait en Equateur dans un bon restaurant où l’accompagnement musical digestif (genre prisé en Amérique Latine) serait soigné aux petits oignons. Edison Pérez nous interprête une ballade romantique authentique aux très légères éfluves andines. “mon expérience est faite d’interprètations des grands noms de la chanson romantique d’Amérique Latine, mais ceci est ma première composition personnelle”. Le jury, plus porté sur la nouveauté que sur la tradition ne retiendra pas cette proposition.

Alors vient l’entracte, pause bienvenue pour reposer nos oreilles et pour vous parler d’une facette du festival pas encore abordée dans cet article. En effet, si ce festival célèbre les musiciens latino-américains, il est aussi une fête pour les collaborateurs de la Maison de l’Amérique Latine, l’association organisatrice. Ainsi on aurra l’occasion, entre les concerts, d’assister, de presque participer, à de cours et hilarants sketchs joués par les participant de l’ateliers “théâtre” de la maison de l’Amérique Latine, une excellente idée! Le foyer du théâtre sera également animé par les musiciens de “Patagonia Express”, groupe réunissant presque exclusiment des collaborateurs de la Maison de l’Amérique Latine. Nous entrons ainsi dans l’univers de cette association d’une jolie manière. Et voir le boss mettre la main a la pâte en fabricant à la chaine les mojitos et autres cocktails colorés n’était pas la pire image que l’association pouvait montrer d’elle même! Bravo!

On va commencer fort pour la deuxième partie du concours, c’est du lourd! Carolina Rimoli est une chanteuse brésilienne qui a déjà une jolie carrière de scène derrière elle. Elle réunit une belle brochette de musiciens brésiliens. Enfin, le brésil est tellement gigantesque, que Carolina se fait un devoir de présicer de quelle partie du sous-continent vient chaque musicien. Sur scène, on assiste à un show extravaguant (enfin, à la mesure de la petite salle), dont on soulignera la présence d’une solide section rythmique (4 percussioniste quand même). La chanson est finement arrangée et efficacement exécutée. Une formation qui détonne donc par son grand proffessionalisme.
Maria Lilia Laguna vient nous faire connaître une facette de la musique argentine peu présentée. En effet, point de tango ni de milonga ce soir pour cette sympathique chanteuse qui profite de son passage en Belgique pour participer au concours, mais de la musique de la campagne du nord de l’Argentine. “J’ai autant appris la musique dans ma famille qu’à l’école. Mon père était mélomane et ma mère m’a initié au folklore argentin. Tandis que d’autre part j’ai étudier au collège péruvien où l’éssentiel du répertoire venait évidement du Pérou.”. Un beau panaché d’influences que l’on n’entendra que de manière sous jacente, car Maria Lilia nous interprête du folklore très proche des racines mais à la manière d’une chanteuse folk très actuelle.

La proposition qui suivra, sera à mon sens, la plus intriguante du lot. José Miguel Arranz, chanteur lyrique de formation, espagnol de nationalité, nous fait le pari de mêler harmonie de grande musique classique avec chanson populaire latino-américaine. Si le résultat n’est pas complêtement à la hauteur, la tentative mérite d’être creusé encore, car le filon n’est pas loin! Les ingrédients sont là, loins des brouets pompeux qu’on a l’habitude d’entendre dans ce genre, c’est dans les timbres de voix étonnants que l’on perçoit la beauté du projet.

Hmmm, Fabinho, tout un poème! L’exhubérence brésilienne et moite incarnée! Sur scène, il tentera de nous planter le décors de la folie rythmique des rues des grandes villes. Mais une athmosphère comme celle-là est difficile à insinuer en 5 minute, surtout face à une salle assise (un handicap difficile à surmonter pour quelques formations de ce concours. Une grande majorité des musiques latines ayant quand même pour but de danser, non?). “Nous sommes là pour partager, pour apporter la joie!”. Si sa musique serait entrainante sur la longueur, elle fait peu de cas de la finesse et de l’harmonie. C’est un choix.

Le Duo Pepe y Mary existe depuis plus de 25 ans, ce dont peu d’entre nous s’était aperçu. Peu importe, ils continuent à chanter sans relâche leurs compositions poétiques. “Nous écrivons de la poésie et nous la mettons en musique, dans ce sens nous nous sentons proche de la “Trova” (mouvement musical renouvellant la chanson à texte en Amlérique Latine dans les année 70 et 80)”. Malheureusement, je n’ai pas eu l’occasion d’assister à l’interprêtation de leur chanson “América mi américa”.

Ceux qui viennent avec un tube comme “Borrachón”, aussi évident mélodiquement pour un européen que pour un latino et avec un thème fédérateur (l’alcolisme), ont bien des chances de se faire remarquer. Si, en plus, ils ont l’expérience scènique de Xaman-ek, c’est clair que la concurence aura fort à faire pour surpasser ça! C’est avec un grand aise que les deux frères chiliens exécute leur chanson. Leur “hymne” pourrait-on dire à entendre comment le public réagit fortement à la musique et au texte. J’entend derrière moi des femmes latino-américaines approuver avec enthousiasme les paroles. J’imagine que nombre d’entre elles ont du connaître un mari, un père, un frère ou un collègue alcoliques et tout le drame qui va avec. “Notre musique est un mélange de la culture de nos parents, de nos grands parents et des jeunes de toutes nationalités que nous avons rencontré ici.” Et, effectivement, ils nous donnent à entendre une cumbia-pop accoustique, pas loin d’un Sergent Garcia mais en plus authentique.

La dernière proposition de ce concours coloré mérite une attention particulière. Colectivo Palo Mulato s’est formé spécialement pour l’occasion, regroupant des musiciens de diverses formations. Comment jouer du “Son Jarocho” (rythme mexicain) avec une énergie casi punk? Demandez-leur, mais je pense que leur jeunesse y est pour quelque chose. Leur enthousiasme aussi! Et les mouvements pelvien zapateo-rock’n’roll du chanteur également! “L’important dans la musique, ce ne sont pas les racines, mais ce qui te fait battre le cœur plus vite, la pulsation, c’est ça le rythme!” me dit le leader du collectif, si vous vous rappelez bien, celui qui, accroché à son charango (sorte de ukulélé latino-américain), bougeait de la crinière tel un fan de hard rock! Une proposition très enthousiasmante donc par des jeunes qui ont des choses à nous dire.

Ainsi se termine le concours en soi. Soit un bel instantané de ce qui se joue comme musiques latino-américaines (et assimilées) en Belgique (et en Europe même, puisque certains candidats débarquaient de pays voisins). Un regard éclairant sur la vie d’une culture qui évolue en direct sous nos yeux.

La salsa féminine n’est pas absolument différente de la salsa masculine, c’est ce que nous démontre Leticia y su Rumbadama de fort jolie manière en conclusion de cette journée riche en plaisirs divers.

Dimanche

Le lendemain, rebellote, nous avons droit à un artiste en ouverture, la prestation des 7 formations sélectionnées et un artsite confirmé en fermeture.

Pour ouvrir donc, Veritango, le trio tango d’Alfredo Marcucci. Oui enfin, si Alfredo Marcucci était là! Le vieil homme étant hélas en convalescence, il sera assez bien remplacé par un de ces ex-accolytes. Du tango à l’ancienne pour commencer et du Astor Piazzola (ça en devient incontournable) pour fermer le concert, c’est un joli récital de bandonéiste, pianiste et contrebassiste (ce dernier dont on n’oubliera pas la truculence de si tôt!).

En parlant de comique, il faut noter que les présentateurs (une hispanophone/francophone et un néerlandophone) ont trouvé leur vitesse de croisière depuis la veille, c’est amusant mais parfois aussi un peu envahissant.
C’est au tours des 7 artistes sélectionés de se présenter pour la deuxième fois sur la scène officielle du concours, cette fois-ci afin de permettre au jury de déterminer les 3 prix officielle et au public de choisir son favoris.

Les sélectionés:
Henri Greindl
Maria Antonia Sabater
Constanza Guzmán
Adrian Vélez
Carolina Rimoli
Xaman-ek
Colectivo Palo Mulato

Les prestations de ceux-ci connaissent des fortunes diverses suivant les conditions techniques et la fraicheur des musiciens. Cela aura sans doute hélas une influence sur le jury.

Les Xaman-ek, non content d’avoir déjà une grande chance d’accéder au podium, enfonce le clou en nous apportant sur scène leur arme secrète, une arme de séduction massive, une arme casi déloyale! A savoir: une (très) mignone choriste et, par ailleurs, petite sœur des deux chanteurs. Il n’en fallait pas plus pour conquérir, le public masculin, le public féminin étant déjà franchement séduit (voir leur première prestation) et obtenir un vrai triomphe!
Triomphe récompensé par, non seulement le prix du public, mais aussi, puisqu’ils ne font pas les choses à moitié, le premier prix du concours! C’était franchement mérité et on attend avec impacience la sortie prochaine de leur futur CD, dont le pactole récolté ici aidera sûrement à la réalisation.

C’est le groupe d’Henri Greindl qui repartira avec le deuxième prix et Carolina Rimoli qui se satisfera d’un troisième prix amplement mérité.

Ce weekend bien rempli se terminera par le concert de Osman Martins et son groupe (soit pratiquement toute sa famille!). Entre bossa nova et samba légère, la finesse et l’entrain du musicien brésilien ajoutera, s’il en fallait vraiment encore, une nouvelle note à la gamme de séduction qu’offre la musique latino-américaine d’aujourd’hui.
Dans l’ensemble, c’est une belle surprise que nous a offert la Maison de l’Amérqiue Latine ce weekend-là: une organisation chaleureuse et pratiquement sans faille et une tenue technique franchement bonne en regard du défit que représente la prestation en un weekend de pratiquement 20 groupes musicaux sur la même scène. Le public a répondu présent en masse et il est difficile d’imaginer qu’il soit déçu!

Premier prix: Xaman-Ek
Deuxième prix: Henri Greindl
Troisième prix: Carolina Rimoli
Prix du public: Xaman-Ek

Hubert de Jamblinne

Une icône de la samba…débarqué à La Bodega!(28/11/09)

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La venue de Sombrinha, ex-membre du mythique groupe « Fundo de Quintal » à Bruxelles pour la « Festa da cachaça » était une occasion de découvrir La Bodega. Lieu connu pour les soirées qui s’y déroulent, (on pense par exemple aux « Stictly niceness », sans les avoir fréquentées) celle de ce samedi 28 novembre était d’une originalité à nulle autre pareille. Par le mélange improbable qu’elle a proposé, la programmation a tenté de satisfaire la communauté brésilienne en s’alliant les divers groupes de population : les gens de l’Etat de Goias, sans doute, avec Junior & Rogério, et leur « country brésilienne », et le public « soirée », qui a pu déguster son lot de beats électroniques, certains danseurs pratiquant même une danse musclée plus qu’acrobatique et qui avait au moins pour mérite d’égayer quelque peu une musique lassante et omniprésente par son volume sonore. Les cariocas et autres amateurs de samba ont du cependant, patienter jusqu’à après deux heures du matin pour voir apparaître la star du soir, accompagnée d’Osman Martins et de son groupe.

 

Le concert de Sombrinha ayant été assez bref, (une petite heure) on ne peut pas garantir que ceux-ci ont été pleinement comblés, mais qu’importe, ils se sont donnés à fond pendant que durait le concert, et l’ambiance était chaude! Jeunes filles superbement mises en valeur par les mouvements débridés que provoquaient la samba, femmes plus âgées qui laissaient exploser leur joie, personnes moins expertes, qui étaient prêtes à se laisser tenter par la danse, tant un bon fluide courait dans les corps. On aurait cependant souhaité un accueil de meilleure qualité pour un musicien de cette trempe, qui n’a, avec son groupe, bénéficié d’un éclairage propre qu’à la moitié du concert. De plus, le matériel de sonorisation n’était pas adapté puisqu’Osman, qui accompagnait Sombrinha, n’a pu obtenir un son correct pour sa guitare et a du se limiter à son cavaquinho. Pour cet aspect là, et la difficulté à communiquer dans un environnement sonorement étouffant, on regretterait presque le « Rio50° », dernier évènement organisé l’année dernière par la revue Brazuca au Senghor, qui était, il faut le dire, plus cosy-mais sans doute moins adapté au public brésilien !

 

Aymeric Lehembre

 

Taraf de Haidouks, Rondo Veneziano tzigane?

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Oui bon, surtout parce qu’ils nous font le coup de la version de morceaux de musique classique. Donc, au niveau du concept, oui, mais attention, dans la réalisation, c’est moins coincé et beaucoup plus bordélique! Enfin, bordélique… c’est ce qu’on aime chez eux, cet ensemble de sons variés qui sonne bastringue et qui tangue comme un bateau îvre. Ivre de chagrin, dans les textes et l’intonation, et de bonne humeur communicative sur scène.

En une petite dizaine année de succès, nos amis du Taraf des brigands (traduction de Haidouks), ont bien changé sur scène. Les voilà passés du groupe de bal pétrifié par un public avide de curiosités folkloriques, à de véritables musiciens professionnels. Et ce sont surtout eux qui insistent sur ce statut. Depuis qu’ils s’évertuent à jouer de la musique respectable, accompagnés d’un véritable chef d’orchestre classique, il ne faut plus les considérer comme de vulgaires amuseurs.

Avant, on avait droit à un groupe qui bougeait à peine sur scène, qui restait bien groupé en rang d’oignon en ce milieu hostile. Mais, dès les choses sérieuses terminées, le naturel revenait au galop. Il ne fallait pas plus d’un quart d’heure avant que la bande ne se pointe dare-dare dans la buvette de la salle pour nous gratifier d’un VRAI concert au milieu d’un public autrement mieux préparé à cette déflagration de rythmes frénétiques. Leurs bringuebalantes farandoles s’accommodent mieux d’un peu d’ébriété.

Et alors maintenant, qu’est-ce qu’on a gagné? Les musiciens maitrisent mieux leur folie et la rendent, de ce fait, encore plus efficace. Maintenant qu’ils s’essayent à des choses nouvelles, on sent vraiment la qualité des musiciens, sortis de leur sérail musical et obligés, armés de leur seul talent, de s’adapter. Et ils font ça bien. Ils ont gagné en aise aussi. Ils se laissent aller à plus de cirque, un petit pas de danse par-ci, un clin d’oeil par-là, on a l’impression de se marier à Cléjani (Roumaine) avec tout le village.

Une nouvelle génération de haidouks vient à présent renforcer le capharnaüm gitan. Un accordéoniste (fils du papy accordéoniste) et un guitariste virtuose (fils d’un autre papy du groupe). Enfin ça reste une histoire de famille, on n’en sort pas, ce n’est pas demain qu’ils mettront une annonce dans le journal afin de recruter un musicien!

Ils jouent près de deux heure sans fatiguer. Il parait que ce n’est rien en comparaison des mariages de Clejani qui commencent vers 18h et se terminent… tôt le jour d’après! Nous sommes sur les rotules et on les remercierait presque de ne pas remettre ça dans le bar du Vaartkapoen pour une nouvelle heure de frénésie. De toute façon, il y le dj Gaetano Fabri qui se charge de finir les derniers convives de ce dimanche soir avec un mix de haute volée de musiques d’Europe de l’est.

Ah oui, oscar de la plus seyante cravate au papy chanteur-violoniste qui illustre cette chronique, mais qu’y voit-on? Noooon, un bel ordinateur (bien vintage me direz-vous)! Un comble pour ce groupe complètement non-électronique!

Hubdidub

Photos de MC Gilles

Taraf-Cravatte

Mama Matrea

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Il existe un chouette resto-bar à Anvers devant lequel il est interdit de garer.

Mais il n’est pas interdit d’entrer et de se faire accueillir par 2 jeunes femmes sympathiques et rastas, l’une aussi grande, blanche et blonde que l’autre est latina et frisée (bolivienne). Dans la cuisine, on entrevoit la mère de cette dernière derrière les fourneaux et dans notre assiette on aperçoit le résultat de tout ça. Des plats venus de nulle part avec des noms pas possibles (« pastarasta ») mais qui arriveront quelque part, dans notre estomac dans un premier temps en tout cas! Et qui au contact de notre palais nous apportent quelques sensations pas désagréables. Sur la carte, une ribambelle de milkshakes exotiques, de cocktails aguicheurs s’ajoutent à une bonne liste de bières dont quelques unes au fût. Ce n’est pas tout, il y a régulièrement aussi des fêtes dans cet endroit ouvert depuis quelques mois où il est possible de danser sur la musique d’excellents dj’s (vos serviteurs y jouaient en novembre 2008).

Enfin bref, je vous conseille chaudement le lieu, on y a été bien reçu et nous y avons rencontré des gens sympathiques.

Mais c’est interdit de garer devant, faites gaffe! Ca coute 50 euros…

Mama Matrea
Lange Nieuwstraat 13
2000 Antwerpen
0496 27 99 73

Hubdidub

Kiran Ahluwalia – Malicieuses chansons d’amour

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Le zuiderpershuis est un temple de la musique du monde avec une infrastructure clinquante, une salle à l’acoustique impeccable, des collaborateurs charmants et une programmation irréprochable mixant les musiques du monde entier, mêlant musiques typiques et fusions modernes. Mais ce n’est pas un haut lieu de la fête, il est assez rare d’y voir le public descendre de sa chaise afin de laisser son corps dialoguer avec les rythmes pourtant parfois propices des formations qui s’y présentent. La sacralisation de musiques, qui n’ont rien demandé de tel, est le danger qui guète la programmation de l’endroit. Il serait dommage de voir ces musiques se « muséifier » et mourir à petit feu à force de ne pas être partager complètement, par le corps et la tête, et ce, sur le simple critère de la différence culturelle. Il n’est pas interdit de danser la salsa (ou autre) même sans en connaitre les pas. La musique est une célébration sans frontière. Il n’est pas nécessaire d’en posséder toutes les clefs pour y participer.

Ce centre culturel pousse à présent le concept plus loin. Il propose des « world sessions« . En pratique cela signifie une « mise en contexte » avant de découvrir la musique proposée. Soit: un film d’introduction, une interview de l’artiste en direct – à laquelle le public est invité à participer, un concert (ouf, on est quand même venu pour ça!) et une session dj dans la cafétéria (hélas pas dans la salle, cet idée du dj au bar, au resto, à la cantine (comme dans ce lieu), au supermarché, chez le coiffeur, enfin, le dj décoratif, commence quand même à gonfler). Si, à priori, l’idée de ces sessions a de quoi séduire; au final, le concert est quand même noyé dans une « mise en condition » un peu pesante.

Kiran Ahluwalia

Et donc, Kiran Ahluwalia, une chanteuse dont on apprend le parcourt en vidéo, du Canada à l’Inde et vice versa, avec qui l’on tchatche durant un quart d’heure (et on attend presque avec anxiété l’interro en fin de soirée) apparaît un peu mise à nu à l’heure du concert. Enfin c’était quand même bon d’apprendre pourquoi, un accordéoniste portugais (amour du fado et similarité avec le ghazal) faisait partie de la formation. Par contre on aurait aimé savoir pourquoi un bassiste européen venait interférer avec ses gammes de blues pesantes dans cette affaire… Donc, en gros, le mystère est hélas vaguement défloré avant même l’ouverture du rideau.

Voilà notre dame: fille d’une famille indienne débarquée au Canada, éprise de la culture de la région de ses origines, travaillant 8h par jour afin d’en maitriser la musique, se produisant et enregistrant en dilettante, et enfin, rattrappée par le succès, adaptant son répertoire aux étroites oreilles occidentales. Le résultat est alors sous nos yeux, en chaire et en notes. De la pop nord-indienne acoustique. Le groupe est formé principalement du duo de compositeurs, elle et le guitariste – bonne bouille de musicien entre ragga, flamenco et blues, un sympa et charismatique joueur de tabla doué d’un sens peu commun du rythme sophistiqué, du précité bassiste complètement hors contexte (ça valait bien la peine de nous infliger une « mise en contexte »!) et donc de l’accordéoniste fadista qui lui semblait entrer de plein pied dans le trip (il faut dire que ce n’était pas là sa première collaboration avec la dame).

Le Ghazal est, si j’ai bien compris, un style de malicieuse chanson d’amour du Penjab. Malice qu’on a ici du mal à associer au pathos des chanteurs de charme. Malice, en tout cas, bien rendue par Kiran Ahluwalia qui ne se prive pas de présenter chaque titre avec détachement et ironie pour notre plus grande joie (ah oui les femmes de cette région sont comme ça alors? Intrigantes et opportunistes) et notre grand dam (ah bon, ça n’existe que dans les films de Bollywood?). Malicieuse, ou immorale à l’aulne des préceptes du politiquement correct occidental, ou délivrant alors une morale vivifiante; retenez ça par exemple celle-ci: « Prenez garde à tailler les branches de vos désirs, afin que l’arbre de votre vie n’en ploie pas sous son propre poids ».

Musicalement on ne s’ennuie pas de cette pop portée par une formation peu conforme: tabla, guitare acoustique, accordéon et voix ouvragée, limite rococo – une chanteuse mature malgré sa voix d’éternelle nymphette. Certains titres plus portés à la gaudriole auraient pu nous faire bondir de nos chaises (si seulement le contexte nous y aidait un peu). Quelques improvisations où l’on respire, quelques solis où l’on suffoque de plaisir, un workshop avorté de chant penjabi ponctuent cette performance convaincante même si un peu pédagogique (ah ce fameux contexte qui ne nous lache plus maintenant!). On peut comprendre que le public demande un rappel, mais on peut aussi déplorer la chanson de trop. Celle qui sera la friandise de trop et finira par nous écœurer. On l’oublie vite et ne retient que cette mixture douce-heureuse où amours et intrigues s’équilibrent dans un monde bollywoodien allégé et raffiné.

Hubdidub

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Turbo Trio (ft BNegão)

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Turbo Trio

Au festival Ciné Brasil Rio 50°, la programmation musicale était incroyable! Rien que de la musique d’aujourd’hui! des Projets contemporains à la pointe de ce qui se fait de meilleur dans le genre dans le monde, tout en gardant un touche brézilienne. Dans cette programmation, on avait pointé BNegão, parce qu’on avait vu son nom sur la compil de Radio Chango et parce qu’on savait qu’il avait été partie prenante du projet « Planet Hemp » (avec MarceloD2), la référence du hip-hop hardcore au Brésil.

Et hardcore, notre homme l’est resté! Pas dans sa bonhommie chaleureuse, l’homme est aussi large que haut et pas qu’au niveau des épaules. Mais dans la pertinence de sa recherche musicale. En ce qui concerne les paroles, on demandera plus tard à des brésiliens. Donc, on s’attendait à une déflagration et, déflagration, il y eut!

Son dernier projet se nomme « Turbo Trio« . Trio parce qu’ils sont 3, ben tiens! Turbo, parce que le moteur dégage une puissance impressionnante. En ce moment le Brésil est envahi par une nouvelle vague d’electro funk fabriqué à base de boîtes à rythme cheap, de samples fantasques (chez Turbo Trio on a entendu « Big In Japan »!) et d’éructations sauvages. Cherchez par exemple les « Bondo Do Role« , plus connus ici, et tous les autres « Bondo do quelque chose », pour comprendre. Bon quand vous avez trouvé ça, rajoutez une couche de hard core, du lourd avec de l’infrabass à foison et des rythmes épileptiques du type Warp (le label de CDs). Placez maintenant deux blanc maigrichons et hilares derrière des ordinateurs portables avec plein d’effets, et un gros base black qui dégage devant, n’oubliez pas les lumières cinglantes et stromboscopiques tournées vers le public, voilà, on commence à voir Turbo Trio. Et ça roule pendant une petite heure, la musique tue, le public qui s’était assis gentillement en position d’observation, s’est mis soudain à la gymn tonic désarticulée sur le parquet de l’auguste centre culturel. Deux jeunes fluets qui font un son aussi énorme, c’est à peine croyable…

La cinquantaine de spectateurs présente au concert se souviendra longtemps de ce projet futuriste brésilien. On n’était pas nombreux et c’est clair qu’une programmation aussi pointue annoncée comme brésilienne n’avait pas beaucoup de sens. Annoncer le concert comme de l’electro hip hop avant-gardiste (genre Anticon, le label) aurait amené un public qui associe hélas encore « Brésil » à « samba » ou « bossa nova » et qui, de ce fait, rate une expérience forte et sans plumes. Le Brésil urbain, contemporain et branché sur le monde.

Hubdidub

Sonantes

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Mélangez Marc Ribot (période Cubanos Poztisoso) et Cibelle (la chanteuse brézilienne) et cela donnera plus ou moins Sonantes. Sauf qu’aucun de ces deux là n’est partie prenante dans ce projet. En fait, il s’agît d’un super groupe de jeunes brésiliens. En y allant hiérarchiquement du plus connu au plus inconnu, on citera Céu – chanteuse qui avait sorti il y quelques mois un CD solo de lounge brésilienne assez bien ficelé, Naçao Zumbi – un des groupe de rock parmi les plus populaires là-bas, et Rica & Gui Amabis – frères de Céu et compositeurs de musique de film.

Qu’est ce que ça donne cette réunion d’égos? Ca a les qualités et les défauts des rencontres de musiciens à fort caractère et planning chargé. On sent que la musique est née dans l’impro et n’a pas été surproduite pendant de long mois avec 17 producteurs qui tels des chirurgiens plastiques s’acharneraient à trouver la perfection avec force guimick. Au contraire, ça sent la bête, les canettes dans le studio et la captation en direct.

Bon le problème c’est que ce disque a été gravé dans 6 studios différents, on imagine, suivant les plannings temporels et géographiques de chacun. Et donc la cohérence de l’ensemble en prend un sérieux coup, on passe d’un blues moderne à une ritournelle pour film méditatif sans comprendre où notre bande veut nous amener, mais qu’est-ce qui les prend? Autre problème, ces musiciens au C.V. en or se regardent parfois jouer dans un confort pas de première fraîcheur, surtout les rockeurs du lot qui exécutent un blues un peu trop propre. Et la voix « loungy » de Céu n’est pas là pour y ajouter des aspérités!

Cependant, au final, la sauce prend sur certains morceaux, grâce entre autre aux arrangements oniriques aux limites de l’expérimental des frères Amabis. Et on entend alors la rêverie d’un Brésil contemporain qui flotte dans la chaleur d’un blues moite.

Hubdidub

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